La quatrième Conférence internationale sur le financement du développement, qui se tiendra à Séville du 30 juin au 3 juillet 2025, constitue une rare occasion de rénover le cadre de financement mondial aux fins de réaliser les Objectifs de développement durable (ODD) et de remédier au déficit croissant de financement des ODD.
Le total des financements à l’appui du développement durable a augmenté, passant de 4 310 milliards USD en 2015 à 5 240 milliards USD en 2022, soit une hausse de 22 %. Cependant, les besoins de financement annuels pour atteindre les ODD d’ici à 2030 ont bondi de 36 % sur la même période, passant de 6 810 milliards USD en 2015 à 9 240 milliards USD en 2022, sous l’effet des défis climatiques, de la pandémie de COVID‑19, des perturbations des chaînes d’approvisionnement et de la hausse des prix des produits alimentaires et de l’énergie. Si le déficit de financement des ODD continue de croître au même rythme qu’entre 2015 et 2023, il devrait ressortir à 6 400 milliards USD en 2030.
Le déficit actuel de financement des ODD, qui s’élève à 4 000 milliards USD, a des conséquences considérables, en particulier pour les pays à faible revenu (PFR). Alors qu’au début des années 2000, les PFR ont vu l’écart entre leur PIB par habitant et celui des nations à revenu élevé se réduire au rythme de 0.5 % par an, cette tendance s’est inversée depuis 2015 : l’écart s’est, depuis lors, creusé de 1.1 % par an. De surcroît, la charge grandissante de la dette pèse désormais sur des investissements critiques dans la santé, l’éducation et la résilience face au changement climatique. En 2024, 24 pays étaient confrontés à un risque élevé de surendettement, contre 16 en 2015.
La quatrième Conférence internationale sur le financement du développement est l’occasion de définir une stratégie concrète pour remédier au déficit de financements. L’innovation dans le domaine des outils pour le financement et pour l’action publique est essentielle. Il s’agit notamment de réformer les politiques publiques et les incitations dans les pays de l’OCDE de façon à mieux aligner les financements sur les ODD, à améliorer le climat d’investissement dans les pays en développement et à réformer les banques multilatérales de développement, ce qui est en cours.
Le renforcement de la mobilisation de ressources intérieures est une pierre angulaire du financement du développement durable. À 11 % en 2022, le ratio impôts/PIB dans les PFR reste en dessous du seuil de 15 % nécessaire à la prestation des services publics essentiels. Il faut poursuivre les efforts visant à accroître les recettes fiscales, à améliorer la transparence, à rehausser le degré de conformité et à renforcer les capacités d’imposition, ce que l’OCDE continuera de faire à travers notre initiative menée conjointement avec le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), « Inspecteurs des impôts sans frontières ».
L’aide publique au développement (APD) reste une source essentielle de financements à l’appui du développement durable. En 2023, l’APD a atteint un niveau sans précédent de 223 milliards USD à prix courants, soit 194 milliards USD aux prix constants de 2015, en hausse de 48 % par rapport aux 131 milliards USD fournis en 2015 par les pays membres du Comité d’aide au développement de l’OCDE. Il est nécessaire d’apporter un soutien supplémentaire pour améliorer les capacités fondamentales et consolider les institutions dans les pays en développement, à travers l’aide-pays programmable, le soutien budgétaire, l’assistance technique et le renforcement des capacités. La qualité des financements est tout aussi importante : les ressources doivent respecter les principes de l’efficacité du développement, défendus par le Partenariat mondial pour une coopération efficace au service du développement, co-hébergé par l’OCDE et le PNUD, si l’on veut être sûrs qu’elles produisent des résultats significatifs.
Les envois de fonds ont augmenté continûment depuis 2015, atteignant 476 milliards USD en 2023, mais le coût des transferts reste élevé, à 6.4 %, soit plus du double du niveau fixé dans les ODD (3 %), ce qui faire perdre aux ménages des pays en développement 16 milliards USD chaque année. Un meilleur accès aux services bancaires, une concurrence accrue sur les marchés et un accès plus large aux nouvelles technologies de paiement peuvent contribuer à réduire les coûts des envois de fonds. Les entrées d’investissements directs étrangers (IDE) dans les pays éligibles à l’APD ont atteint 335 milliards USD en 2022, un niveau analogue aux 338 milliards USD enregistrés en 2015.
Des initiatives telles que la Plateforme virtuelle d’investissement pour l’Afrique, gérée conjointement par l’OCDE et la Commission de l’Union africaine, ou la Boîte à outils des politiques relatives aux qualités de l’IDE peuvent contribuer à mobiliser des IDE et à optimiser leur qualité.
Cette édition spéciale des Perspectives mondiales du financement du développement durable de l’OCDE fournit aux responsables publics et aux négociateurs des éléments factuels, données et analyses essentiels pour éclairer la position de leurs pays dans la perspective de la 4e Conférence internationale sur le financement du développement, et pour, in fine, contribuer à optimiser l’impact d’un nouveau cadre financier pour le développement. L’OCDE continuera d’aider les pays à porter à une plus grande échelle les financements à l’appui du développement durable, notamment en produisant des données et analyses robustes pour la Conférence, et au-delà.
Mathias Cormann
Secrétaire général de l’OCDE