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Royaume-Uni

Une croissance plus forte et plus juste, clé de la sécurité économique

 

Plusieurs années de récession mondiale, de stagnation puis de reprise lente et incertaine ont prouvé que nous n’étions pas encore parvenus à asseoir un modèle économique capable de garantir la croissance forte et durable indispensable aux avancées sociales et économiques du futur.

Les recherches du FMI ont montré que la croissance et un partage équitable des gains étaient essentiels, la réduction des inégalités de revenus permettant des progrès économiques plus rapides et durables. Pourtant, ce constat a été trop souvent ignoré, avec des conséquences catastrophiques pour les travailleurs du monde entier.

La situation actuelle du Royaume-Uni nous montre à quel point ce modèle économique est usé, et pourquoi il faut le réparer. Si, à l’international, la reprise de notre marché du travail a été présentée comme une réussite exceptionnelle, la hausse de l’emploi n’est qu’une facette de la réalité. Depuis des années, les travailleurs britanniques voient leur salaire réel diminuer, et les taux tendanciels d’augmentation des salaires restent bien en-dessous des niveaux d’avant la crise. En termes de niveaux de vie, les cinq dernières années ont été les pires de toute l’histoire du Royaume-Uni.

La pression sur les salaires ne vient pas seulement de leur moindre progression, mais tient aussi aux types d’emploi que nous créons. Le travail indépendant est beaucoup plus répandu, notamment dans certains secteurs faiblement rémunérés. Les emplois occasionnels et précaires se multiplient, portés par exemple par les contrats « zéro heure » qui ne garantissent aucun temps de travail. Les secteurs à bas salaires représentent aujourd’hui une proportion de l'emploi plus large qu’auparavant. Nous créons des emplois, mais pas de manière suffisante dans les postes stables à moyennes ou hautes qualifications qui permettraient d’offrir de réelles perspectives aux travailleurs et à leur famille.

Au problème des salaires s’ajoute l’effondrement de la productivité. La reprise économique actuelle est la plus lente de l’histoire, et l’évolution tendancielle de la productivité montre bien pourquoi : les niveaux d’investissement baissent, les exportations sont faibles, les dépenses publiques pèsent sur le PIB et les capacités sont manifestement sous-utilisées. L’économie britannique est en train de rejoindre la voie lente, et une amélioration des salaires et des profits dans les années à venir ne peut s’envisager sans un changement d’orientation.

La proposition de la Confédération britannique des syndicats (TUC), conforme dans ses grandes lignes à la position de la Commission syndicale consultative auprès de l’OCDE (TUAC), comporte trois axes : stimuler la demande, accroître la productivité et créer un cercle vertueux fondé sur une répartition équitable des gains pour les travailleurs.

La croissance durable doit être notre priorité. Il faut donc investir dans des infrastructures et des services qui doperont le PIB dans les prochaines années. Les politiques budgétaire et monétaire doivent aller dans la même direction, et non s’éparpiller. Il nous faut de nouvelles infrastructures, des avancées technologiques et une recherche innovante qui bénéficient à tous les secteurs et toutes les régions, et non une reprise incertaine alimentée par les bulles de la dette et de l’immobilier.

Une économie forte suppose également une résolution progressiste des problèmes croissants liés à l’offre. Il faut développer les crédits bancaires aux entreprises, les décisions à long terme des entreprises doivent s’appuyer sur une gouvernance d’entreprise de qualité, et notre système d’enseignement professionnel ne doit plus laisser tant de jeunes sur le bord de la route.

Cela étant, même une fois la productivité accrue, nous ne pouvons simplement présumer du partage équitable de ses bénéfices. L’histoire a montré que ce type d’ajustement ne se produisait pas naturellement. Il nécessitera un infléchissement important de l’action publique en faveur du relèvement des planchers salariaux, de l’élargissement des négociations collectives et de la réglementation du marché du travail afin d’empêcher le nivellement par le bas.

Partager plus équitablement les fruits de la croissance n’est pas une option facultative : l’amélioration des conditions de travail et des salaires stimulera en retour notre croissance, car les travailleurs dépensent leur salaire et les revenus sont générés pour être investis. De plus, si la consommation s’appuie non sur une hausse des salaires réels mais sur l’endettement des ménages, nous allons droit vers une nouvelle crise financière. Faute de conjuguer reprise solide et partage plus juste des richesses, notre économie risque véritablement de s’essouffler.

L’expérience du Royaume-Uni est une leçon pour le reste du monde. Nous avons besoin d’un modèle économique fondé sur une demande renforcée, une croissance équilibrée et un partage plus juste des richesses créées ensemble. Il faut pour cela privilégier les investissements aux coupes budgétaires, adopter une approche économique progressiste face aux défis structurels et mettre en place les leviers politiques d’une redistribution équitable.

Voir www.tuc.org.uk et www.tuac.org/fr


Travaux de l'OCDE sur l'emploi

Travaux de l'OCDE sur le Royaume-Uni

Thématiques du Forum de l'OCDE 2015

L'Observateur de l'OCDE

‌‌‌‌Frances O'Grady

Frances O'Grady
Secrétaire générale
du British Trades
Union Congress (TUC)

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2015

 

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